Le Waterlight Graffiti d’Antonin Fourneau va bouleverser notre paysage urbain

15 mars, 2017

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C’est à l’occasion de Nuit Blanche 2012 que nous avons découvert le projet Waterlight graffiti d’Antonin Fourneau. Il a eu l’envie folle de réaliser des graffitis avec de l’eau et de la lumière. Au contact de l’eau, des LEDS s’illuminent au gré de pinceaux ou d’aérosols. Son ambition est de faire de Waterlight graffiti un nouvel élément de notre paysage urbain, à la fois pérenne dans son installation, et muable dans sa composition artistique. Mais celui qui en parle le mieux c’est encore le père du projet… Projecteur sur Antonin Fourneau.

Antonin Fourneau sur un mur de Water Light Graffiti


Interview Antonin Fourneau par Strip Art


STRIP ART : Comment le projet Waterlight Graffiti est-il né ?

ANTONIN FOURNEAU : En début d’année 2012 j’ai été invité au Central Academy of Fine Art à Pékin, qui est un peu l’université des Beaux-Arts, pour animer un workshop sur l’idée d’interaction. J’ai proposé de travailler sur des principes d’interactions à partir d’éléments naturels que ce soit de l’eau, du feu, de la terre, des feuilles mortes…

Hong Kong, 2015 © Antonin Fourneau


« Lors d’une pause j’ai observé un monsieur pratiquer du dishu, qui veut littéralement dire dessiner par terre. »

C’est une pratique chinoise consistant à dessiner avec de l’eau, et avec un balais ou un gros pinceau, de la calligraphie au sol. Et à force de voir des panneaux de LED un peu partout dans l’environnement urbain chinois, j’ai commencé à me demander si je ne pouvais pas faire une sorte d’ardoise magique. Elle mélangerait le principe simple d’un panneau de LED et utiliserait le contact avec le l’eau pour allumer les LEDS.

Dishu, technique chinoise

Les rues de Pékin


En fait en amont de cette idée j’avais réalisé en 2009 un projet avec un objet qui s’appelait JAWEY, qui était une mâchoire, une sorte de prothèse dentaire, qui permettait d’allumer des lettres au contact de la langue. Donc j’avais déjà fait un système où j’allumais des LEDS avec de l’eau.

oeuvre JAWEY, 2009 © Antonin Fourneau


J’ai réalisé le premier prototype en A3 de Waterlight Graffiti en avril 2012. Suite à ma venue dans la ville, pendant l’été 2012, Poitiers a trouvé le projet pertinent et m’a financé pour réaliser un grand format et une première présentation publique en juillet 2012.

« Voilà la genèse de Waterlight Graffiti. »

waterlight graffiti

Logo Waterlight Graffiti


STRIP ART : Vers quoi aimeriez-vous que le projet évolue ?

« ANTONIN FOURNEAU : Dès le début du projet une de mes envies était de créer un matériau architecturable. »

J’aimerais à l’avenir proposer à des architectes de poser des murs de Waterlight dans l’espace urbain. Aujourd’hui Waterlight, même si ça fait trois ans que ça tourne, est encore une sorte de grand prototype, avec des murs qu’on expose un mois ou deux mois, ou juste une soirée, mais qui ne sont pas pérennes. Mon désir serait d’en faire une dalle que n’importe quel architecte pourrait installer dans l’espace urbain.

© Antonin Fourneau


L’une de mes préoccupations, et l’un de mes intérêts en tant qu’artiste, ce sont les formes d’interactions que l’on peut proposer dans l’espace urbain. Comment interagir avec le grand public dans la ville.

Hong Kong, 2015 © Antonin Fourneau


Je suis, en tant qu’enseignant en design textile et matériaux aux Arts décoratifs de Paris, toujours intéressé par la dimension matérielle, où comment arriver à produire un matériau. Donc aujourd’hui je fais des recherches pour rendre Waterlight graffiti complètement pérenne, avec une véritable résistance matérielle et physique.

WLG, Cannes, 2015 © Antonin Fourneau


Un projet d’expression qui rend heureux


STRIP ART : Quel est le lien du projet et votre lien avec le graffiti ?

ANTONIN FOURNEAU : Le lien du projet avec le graffiti me semble assez clair. C’est une surface de dessin ouverte au grand public, dans l’espace urbain; espace commun devrais-je dire.

« C’est une surface d’expression, ce qui pour moi est le propre du graffiti. »

WLG, Stereolux, Nantes, 2013 © Antonin Fourneau


Mon lien avec le graffiti explique peut-être un peu le projet..

« J’ai voulu moi-même faire des graffitis à une époque, mais j’avais honte. J’étais mauvais. »

Je n’ai d’ailleurs pas insisté très longtemps. J’ai plutôt bricoler des choses dans mon coin. J’étais fasciné par la capacité des gens à dessiner en grands formats.


Je pense que pour moi Waterlight est une sorte de surface d’exercice. Comme on peut graffer et que ça disparaît, ça permet de s’entraîner et d’avoir une certaine aisance dans le format, dans la dimension, sans pour autant faire un mur moche et saccagé. Parce qu’il y a quand même toute une phase dans le graffiti où il faut apprendre et pour moi les premiers graffitis sont vraiment moches.

« Il faut se faire la main et arrivé à produire, pas forcément des choses belles mais plutôt intéressantes, intrigantes et nouvelles. »

Waterlight Graffiti de l’artiste Kaalam, Stereolux, Nantes, 2013 © Antonin Fourneau


STRIP ART : Quel public souhaitez-vous atteindre avec ce projet ?

ANTONIN FOURNEAU : Je n’avais pas forcément d’idée très précise du public à atteindre et il s’avère que Waterlight atteint un peu tous les publics. Ça intéresse les street-artistes parce que c’est comme un mur d’expression temporaire.

WLG, la Nuit Des Musées, 2015 © Antonin Fourneau


« Un peu à l’image du Light Painting c’est un exercice de vitesse, de mouvement plus que du temps. »

L’eau sèche donc on n’a pas autant de temps que l’on veut pour réaliser le graffiti.

WLG, Cannes, 2015 © Antonin Fourneau


Ça plaît évidemment aux enfants. Il y’a un côté inattendu de poser de l’eau et de révéler de la lumière. Ça plaît aussi à des gens qui sont purement technique et intrigués de ce non-sens qu’est d’utiliser de l’eau pour allumer un truc électrique; ce qu’on nous a toujours interdit de faire.

Ma piste à moi c’est le grand public.

NRDC, A Credstyle Films Director’s Cut, 2015 © Antonin Fourneau


« Mon intérêt est de casser une routine et de créer un peu de bonheur »

Ça fait sourire les gens de faire quelque chose de nouveau. Je suis très content quand je vois le sourire des gens face à Waterlight Graffiti.

Waterlight Graffiti, Hong Kong, 2015 © Antonin Fourneau


Un artiste entre matière artistique et informatique


STRIP ART : Quelle est votre formation ? Votre secteur d’activité ?

ANTONIN FOURNEAU : J’ai d’abord obtenu un bac scientifique, j’ai ensuite passé deux années d’errance à ne pas trop savoir quoi faire avec ce bac, à faire math/informatique appliqué aux sciences, puis un IUT informatique. J’ai finalement atterri dans une fac d’art plastique, sans pour autant y trouver exactement mon compte, et finalement aller à l’école d’art d’Aix en Provence.

Digital Art Festival, Japon, 2007 © Antonin Fourneau


Cette école mélangeait à la fois une dimension artistique conventionnelle et à la fois une dimension un peu nouvelle, avec de la robotique et de la programmation. J’ai fait cinq années d’études dans cette école d’art, tout en faisant une vraie pratique artistique à côté. J’ai ensuite migré à Paris pour faire un post diplôme aux Arts décoratifs de Paris, qui s’appelait «atelier de recherche en interactivité».

Workshop, Beaubourg, 2011 © Antonin Fourneau

Worshop ENSAD, Studio AOC, 2011 ©Manuel Braun


Mon activité depuis se passe à la fois dans les résidences d’artistes, expositions, festivals et à la fois dans mon travail d’enseignant. Je suis enseignant aux Arts Décoratifs de Paris en design textile et matériaux.

« Le textile est l’ancêtre de l’informatique si on regarde le métier à tisser. »

Atelier de tissage Michel Gander métier à tisser mécanique en fonte XXe


Il y a beaucoup de notions de programmation et de rendu en textile. Ce secteur est aussi très ouvert à la recherche sur les matériaux, ce qui me fascine. J’interviens dans d’autres écoles également.

Worshop ENSAD, Studio AOC, 2011 © Antonin Fourneau


Récemment j’ai ouvert un groupe de recherche qui s’appelle GoD|Art : Game oriented Design | Art, le jeu orienté sur le design et l’art et vice versa.

« L’idée est de voir quelles sont les influences de toute une génération de joueurs. »

Workshop CAFA, 2012 © Antonin Fourneau


Quelles influencent ils ont quand ils créent un objet de design ou d’art, et inversement, comment l’art et le design peuvent influencer le jeu en lui-même. Nous avons différents projets d’expositions et de publications autour de ces influences art et jeux vidéo.

Workshop Head Dont Touch Game, 2015 © Antonin Fourneau


Il y aussi le projet ENIAROF, «foraine» à l’envers, qu’est un projet de fête foraine que j’anime depuis 2005. L’idée est de créer des fêtes foraines à l’image de la fête foraine un siècle un arrière, qui était inventive avec des choses qu’on ne voyait pas partout. Nous avons fait une vingtaine d’ENIAROF où nous présentions au public nos idées de jeux, d’installations, d’attractions… Et puis on jouait ! Nous allons sortir un livre dans lequel nous expliquons, comme dans un livre de cuisine, comment se monte un ENIAROF.

ENIAROF Lille, 2014 ©Manuel Braun

ENIAROF, Aix-en-Provence, 2013 ©Manuel Braun

ENIAROF, Aix-en-Provence, 2013 ©Manuel Braun


Projets, projets, projets…


STRIP ART : Avez-vous de futurs réalisations prévues avec Waterlight Graffiti ?

ANTONIN FOURNEAU : Nous sommes en phase de développement d’un Waterlight Color. C’est beaucoup plus de travail. On va dire qu’il y a un projet analogique (Waterlight) et un autre numérique (Waterlight color).


Après il y a des projets qui sont un peu dans la lignée de Waterlight mais pas forcément avec de l’eau. Je travaille sur un projet de résidences en Nouvelle-Zélande. Je vais partir trois mois cet été pour essayer de créer le prototype d’un mur qui se dessine avec le son et la voix.

« Selon ce que l’on chantonne, la manière dont on module sa voix, on dessine en couleur à la surface du mur. »

water light graffiti

Hong Kong, 2015 © Antonin Fourneau


STRIP ART : D’autres projets en cours ?

ANTONIN FOURNEAU : Il y a la sortie du livre ENIAROF en mai. Nous allons faire un lancement du livre à Montreuil avec un vernissage et une journée ouverte au public avec des attractions. Et puis il y a d’autres ENIAROF qui vont se monter.

ENIAROF, Aix-en-Provence, 2013 ©Manuel Braun

ENIAROF, Aix-en-Provence, 2013 ©Manuel Braun

ENIAROF, Poitiers


Dans les autres projets en cour on a plusieurs Waterlight qui vont tourner un petit peu partout: un grand mur pour un évènement à Madrid, le projet m’accompagnera certainement en Nouvelle Zélande, on a plusieurs petites expositions aux Emirats, à la Nouvelle Orléans…

« L’aventure Waterlight continue quoi qu’il arrive ! »

Waterlight Graffiti :

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– Doriane Coelho –

15 mars, 2017

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Catégorie(s) : Street Art / Art Urbain

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