L’Artiste Allemand, Hendrik Beikirch signe ses oeuvres de rue des lettres ECB. Né le 6 mars 1974 à Cassel, il commence a peindre depuis sa tendre enfance. Il est diplômé de l’école d’art de Coblence en Allemagne, où il vit toujours aujourd’hui. Internationalement connu pour ses immenses fresques, ses oeuvres arpentent les rues d’Europe, du Canada, des Etats-Unis, du Mexique, d’Australie, ou encore celles de Chine et de Russie.
Son amour pour le graffiti prends ses racines le jour où il découvre dans sa salle de classe, en cours d’art, une photo des années 80 dans la ville de New-York, sur laquelle on voit une voiture de métro recouverte du graffiti «Stop The Bomb» de Lee Quinones. «J’étais totalement fasciné par Lee Quinones» confit-il. C’est ensuite le rapport à l’espace de Richard Serra et le réalisme autant que l’abstraction de Gerhard Richter qui influenceront sa direction artistique. « Lorsque j’étais ado, j’ai trouvé dans le graffiti une nouvelle forme d’expression et de liberté » raconte-t-il.
Depuis ses premiers graff en Allemagne de l’Ouest à la fin des années 90, Hendrik a toujours évolué hors des sentiers battus. Des formes géométriques abstraites, aux paysages urbains, en passant par les portraits monochromes, son style s’est rapidement authentifié. Longtemps associé aux writers Reso et Dare, il a su, tout au long des années 90, entremêler l’esthétisme des lettrages, des graphismes et des personnages. Un dialogue analysé et illustré dans l’ouvrage « Straight Lines » publié en 2004 chez Publikat, où l’on découvre dix ans de son travail en Suisse et en Allemagne.
S’éloignant rapidement du graffiti traditionnel, ECB développe son travail en atelier au même rythme que celui de rue. D’abord épuré, puis de plus en plus riche en détails, il s’inspire de ses rencontres et des émotions qui l’entourent. Proche du photo-réalisme lorsque l’on regarde ses oeuvres de loin, elles deviennent de plus en plus abstraites à mesure que l’on s’en rapproche. Cet effet visuel, l’artiste peut surtout l’aborder et s’en amuser à travers de très grands formats. « Dans l’espace public, l’art n’a que deux options : soit il est clandestin, caché, petit, soit il est gigantesque ! ». Il a vite choisi son camp !
Plus les années passent plus son appétit des oeuvres monumentales grandit. Il transforme ainsi la simple action de peindre en une intervention magistrale à la technique spectaculaire. Il peint ainsi en 2012 la plus grande fresque murale d’Asie à Busan (Corée du Sud): le portrait d’un vieux pêcheur sur une hauteur de 70 mètres. Pourtant réalisée sans projecteur, ni croquis sur grille, la technique d’Hendrik est d’une étonnante précision.
«En arrière-plan, les gratte-ciel désignés par Daniel Libeskind, offrent un cadre parfait, à la fois sur le plan esthétique et le contenu ». ECB place ainsi beaucoup d’intérêt dans l’emplacement de ses oeuvres, qui n’ont pas peur de contraster avec un urbanisme clinquant. Kassel, sa ville natale fut entièrement reconstruite après les bombardements de 1943, c’est pourquoi, depuis, la question de l’homme face à la ville est le fil conducteur de sa peinture.
Des portraits sensibles et réalistes tirés d’une technique abstraite
Depuis ses premiers éclats de peinture en 1989, sa méthode a beaucoup évolué, passant des formes graphiques à un art plus raffiné, subtil et texturisé. « Je mets aujourd’hui l’accent sur les textures afin de souligner l’expression de mes portraits ».
Ainsi de loin, ses oeuvres s’apparentent au photo-réalisme, tandis que de près, les formes s’entremêlent pour devenir un ensemble consistant de lignes fines, libres et abstraites. « J’aime que ces murs géants se lisent avec la perfection du photo-réalisme et deviennent plus abstraits lorsqu’on s’en rapproche en raison des gouttes et des textures abstraites ».
Sans être un artiste engagé, l’art d’ECB est toujours empreint d’une conscience sociale et politique avec laquelle il ne se lasse pas de jouer. L’utilisation de noir et blanc lui permet, de manière évidente, de mettre en exergue les expressions de mélancolie, de tristesse, mais aussi de liberté, de ces rencontres, qu’elles soient fictives ou réelles. Chaque ridule raconte l’histoire de faciès dont la richesse et le vécu s’opposent aux images lisses et fades qui matraquent les villes. Car cette monochromie est aussi une manière pour lui de contraster avec les panneaux publicitaires et la manipulation médiatique que nous subissons. C’est une véritable leçon d’humanisme et de sagesse que nous content ces compagnons silencieux.
Ses portraits meurtris, couverts d’histoire et de douleur, vont aussi à l’encontre du diktat de la beauté que nous impose notre société. La volonté d’être anti-conventionnel, il l’applique aussi dans l’emplacement de ses oeuvres, où les building de luxe côtoient des portraits défraîchis. « L’art doit rivaliser avec l’architecture et la publicité, et capter l’attention des passants alors que la rue peut être déjà bien occupée ». Ces oeuvres illustrant la profondeur de l’âme, sincères et touchantes, sont le reflet d’un artiste discret qui s’efface volontiers au profit des sujets qu’il aborde.
L’un des grands projets de ses dernières année de l’artiste est Tracing Morocco, réalisé à la résidence Jardin Rouge au Maroc. Depuis 2014 ECB séjourne chaque année, par période, dans une résidence d’artistes au Maroc. Il y réalise 22 portraits, exposés à Marrakech en décembre 2015, puis publié dans un livre par The Art Foundation Montresso, dont 50 exemplaires étaient signés et numérotés par l’artiste.
Frappé par le décalage entre la modernité qui gagne ce pays et les savoirs ancestraux qu’il renferme, l’artiste a voulu rendre hommage au travail des villes et des champs marocains qui disparaissent peu à peu. Son travail préparatoire consiste à s’imprégner de leur vie, de leur personnalité, il prend le temps de leur parler et de les connaitre afin de déchiffrer avec précision les sentiments qui les habitent. Une fois photographiées il a immortalisé ses inoubliables rencontres à travers une exposition, un livre et sur les murs du monde entier. Il transforme alors l’image de ces anonymes en un message humaniste universel, sans entraver la part d’intimité que recèle chacun d’eux. L’un de ses portraits a notamment été réalisé cet été 2016 à l’occasion du Rose Beton Festival de Toulouse.
En septembre 2016, l’artiste a réalisé une immense fresque dans les rues de Mannheim en Allemagne. C’est à l’occasion du Stad Wand Kunst Street Art Project que l’oeuvre «Vera» voit le jour.
Nous avons aussi eu la chance de découvrir une oeuvre d’Hendrik Beikirch dans les rues de Paris. C’est sur le mur d’Oberkampf, que l’artiste allemand a pu s’exprimer en avril 2016.
Le Mur N°207 – ECB :
Propos recueillis par Widewalls et Ekosystem
– Doriane Coelho –
Catégorie(s) : Street Art / Art Urbain