Pejac: Un art subtil mêlant mélancolie, humour et poésie

14 septembre, 2015

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Pejac est né à Santander, en Espagne, en 1977. Il a étudié les Beaux Arts à Salamanque, puis à Barcelone. Avec l’aide de la subvention Pancho Cossio accordée par le Gouvernement de Cantabrie, il continue en 2000-2001 ses études à l’Accademia di Belle Arti di Brera à Milan. En utilisant des techniques multidisciplinaires, son travail traite de sujets tels que la liberté, la paix et le lyrisme, et revient souvent avec subtilité et intelligence dans les rêves surréalistes. Si son art de la rue a déjà convaincu nombre de disciples, Pejac travaille également sur ​​la toile et d’autres médias, de la création de petits tirages aux grandes peintures murales extérieures . Il vit et travaille à Barcelone mais on peut trouver ses œuvres dans les rues de nombreuses villes à travers le monde (Valence, Madrid, Paris, Moscou, etc … ).

pejac portrait

Contrarié par l’attitude élitiste de ses professeurs de dessin, Pejac décide de peindre sur les murs et dans la rue pour offrir et faire découvrir son art à ceux qui ne peuvent ou ne veulent pas visiter les musées. Son travail poétique utilise le noir et blanc pour une transmission plus neutre mais aussi plus efficace. «La mélancolie et l’humour sont la locomotive de mes œuvres. Ils créent un langage poétique dont l’essence ne repose pas sur la beauté simple, mais sur la face cachée de tout. » 

A l’extérieur, il utilise pochoirs et bombes pour orner les villes au gré de son imagination. A l’intérieur, il modifie la réalité à l’aide de ses toiles ou de collages sur ses fenêtres.

Les fenêtres de Valence

« Il y a trois ans, lorsque je vivais à Valence, j’étais dans une maison avec d’immenses fenêtres, une vue sur des blocs d’immeubles tristes entourés par des caméras de surveillance, confie Pejac au HuffPost. Ça m’a donné l’impression de n’avoir aucune vie privée. » « Une fois que j’ai eu acheté et accroché des rideaux, j’ai décidé d’utiliser les fenêtres comme un support ou plutôt un filtre pour changer ma vision de la réalité extérieure », poursuit l’artiste espagnol.

Pejac Valence

Pejac Valence

Pour cette série, l’artiste se focalise sur les ressources offertes par la ville et sur comment jouer avec. Équipé de quelques feuilles de papier, d’un cuter, de la colle, et de sa grande imagination, il change radicalement la perception de la réalité qui nous entoure, transformant la vie de tous les jours en un rêve subversif.

Dans la série de Pejac sur les fenêtre de Valence, il décide, sur les traces d’un avion fraichement passé, de rendre hommage au funambule français Philippe Petit, connu pour sa traversée entre les sommets des deux tours du World Trade Center. « J’ai eu l’idée de jouer avec les traces des avions et d’en faire mon humble hommage à Philippe Petit, une personne que j’admire vraiment », raconte Pejac.

Pejac Valence

Sur ce même avion qui passe tous les jours sous ses fenêtres, il crée un personnage qui le vise au lance pierre… Il se met aussi en scène, avec un autoportrait de l’artiste dessinant un cœur devant les caméras de surveillance.

Pejac Valence

Pejac Valence

Les références aux grands maitres

On peut trouver des oeuvres de Pejac un peu partout à travers le monde. Dans sa volonté d’offrir l’art à tous, il n’est pas rare de le voir rendre hommage à des grands artistes, comme à Santander, sa ville natale en Espagne, ou il fait clairement référence au « Concetto Spaziale » de Lucio Fontana par son oeuvre Wallcanvas.

Pejac "Wallcanvas" - Lucio Fontana Tribute - Santander

Pejac « Wallcanvas » – Lucio Fontana Tribute – Santander

A Paris, c’est rue Edouard Manet, dans le 13ème arrondissement, qu’il rend hommage au grand peintre. « Vandal-Ism » représente l’action d’un jeune garçon,« le résultat de la colère et de la sensibilité esthétique à la fois », explique Pejac. « C’est comme s’il commettait un acte de vandalisme illustré. » Ici, c’est la fameuse toile du « Déjeuner sur l’herbe » qui apparait dans la projection du jeune passant.

Pejac "Vandal-Ism" - Paris

Pejac « Vandal-Ism » – Paris

Pejac "Vandal-Ism" - Paris

Pejac « Vandal-Ism » – Paris

En Asie, l’artiste fait un hommage à Rodin, en posant le fameux Penseur sur un immeuble, ce dernier étant peint sur une fenêtre pour créer un effet d’optique comme Pejac sait si bien les faire.

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Exercice difficile, c’est dans le Nord de l’Espagne, à Santander à nouveau, sur la proue d’un vieux navire abandonné et rouillé, que Pejac rend hommage au célèbre impressionniste Claude Monet et à sa toile « Impression soleil levant »: « Impression, soleil levant » est une image qui m’a toujours fasciné, a déclaré l’artiste dans une interview pour BrooklynStreetArt.com. La première fois que j’ai vu la peinture de Monet j’ai été surpris par le titre, je pensais que c’était un coucher de soleil. Voila pourquoi mon clin d’œil s’intitule lui « Impression soleil couchant ». Et de continuer: « Avec les marées de la côte Cantabrique, le travail est constamment dessous puis à la surface de l’eau. La mer agit comme le rideau d’un thêatre », commente l’artiste à l’imaginaire débordant.

Pejac "Impression soleil couchant" - Santander, Espagne

Pejac « Impression soleil couchant » – Santander, Espagne

Pejac "Impression soleil couchant" - Santander, Espagne

Pejac « Impression soleil couchant » – Santander, Espagne

Enfin, dernièrement, à l’occasion du NuArt festival à Stravanger en Norvège, c’est à Munch et à son célèbre cri que Pejac fait référence à travers son œuvre « Drift », ou les traces d’une petite voiture d’un enfant qui joue sur un mur dessinent le très fameux tableau.

Pejac "Drift" - Norvège

Pejac « Drift » – Norvège

Pejac sur les murs

Entre Moscou, Paris, Londres, Istanbul, Santander ou Milan, les oeuvres de Pejac embellissent les murs d’une façon toujours fascinante, entre Street Art créatif et détournements urbains, ses trompes l’œil originaux semblent montrer que la créativité de l’artiste n’a pas de limites.

A Paris, il s’inspire des voyages de Gulliver pour illustrer la cruauté humaine, et ce dès son plus jeune âge, ou à la faiblesse de sa condition. « Je pense que souvent – plus ou moins consciemment – nous sommes ceux qui tiennent la loupe, comme la petite fille, et d’autres fois nous sommes ceux sous le brûlant rayon de lumière ».

Pejac "Les Fourmis" - Vitry Sur Seine

Pejac « Les Fourmis » – Vitry Sur Seine

Pejac "Les Fourmis" - Vitry Sur Seine

Pejac « Les Fourmis » – Vitry Sur Seine

Rêveur, l’artiste ne peut s’empêcher de voir le monde autrement. A l’image de cette brèche sur un mur, qui lui inspire aussitôt cette œuvre, « Exit to Surrealism », dont il dira « Pour ce trompe l’oeil, j’ai improvisé, car j’ai toujours adoré tordre la réalité ».

Pejac "Exit to surrealism"

Pejac « Exit to surrealism »

En Asie, il passe par Hong Kong, Seoul ou Tokyo, et crée des œuvres amusantes qui font référence à la célèbre estampe de La Grande Vague de Kanagawa de Hokusai ou encore au mythique dragon des légendes chinoises.

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Lors de son voyage à Istanbul en 2014, Pejac affiche ses talents pour l’illusion d’optique lors de son triptyque « Serrure, Affiche et Volets », trois pièces différentes, peintes très proches les unes des autres, sur les murs du quartier d’Uskudar. Les trois peintures murales sont censées représenter la « perception et l’illusion de la liberté ».

Pejac – Istanbul – 2014

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Pejac – Istanbul – 2014

Pejac - Istanbul - 2014

Pejac – Istanbul – 2014

Son style chic et élégant se heurte souvent à un personnage qui lui est cher, l’épouvantail. Dans ses yeux poétiques, ce dernier n’est pas un être qui fait fuir les oiseaux, mais au contraire un accessoire qui leur permet de voler librement.

Pejac "Esparcepajaros" - Epouvantail

Pejac « Esparcepajaros » – Epouvantail

Les œuvres de Pejac, qu’elles soient intérieures ou extérieures, évoquent la même vision lyrique et onirique du monde: les hommes, les animaux, la nature, l’art, le ciel, la ville, nous sommes une seule et unique chose. La peinture et le graffiti intitulé « Mi unica bandera » (Mon seul drapeau) est la synthèse de cette pensée: le seul drapeau que l’artiste voit, en fait, est un enchevêtrement de feuilles et de branches qui tendent vers l’infini.

Pejac "My Only Flag" - Moscou

Pejac « Mi unica bandera » – Moscou

 « Les réactions des gens me font continuer. La vie est pure inertie, qui semble être rompue seulement par les mauvaises nouvelles ou les motivations, et si je peux faire réfléchir les gens, tout cela prend sens », explique l’artiste. Pejac a su détourner des objets de leur quotidien et leur donner un sens différent. Il ouvre les portes de l’univers de la poésie, mais aussi celui de la réflexion. Certaines de ses créations monochromes peuvent dans un premier temps prêter à sourire, mais elles sont bien plus profondes. L’artiste nous apprend à décrypter notre environnement ordinaire et à le rendre plus supportable.

Retrouvez en vidéo une rétrospective du travail de l’artiste


Plus d’informations sur Pejac:

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14 septembre, 2015

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Catégorie(s) : Street Art / Art Urbain

Une réponse

  1. artfordplus dit :

    Un vrai modèle pour moi ce Pejac. Amener le spectateur à changer la perception de son quotidien est ce que je souhaite faire également dans ma démarche. Il y a beaucoup d’étrangeté et de décalage dans son travail comme pour créer un trouble.
    Ce que j’apprécie le plus chez cet artiste c’est la simplicité et l’authenticité avec laquelle il nous emmène dans son univers. Mais aussi son imagination naturel, qui se traduit parfaitement dans ses réalisations. Enfin son art est accessible à tout les couches de la population.
    Que dire à part bravo l’artiste!

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